Joëlle Ferly

Québécitude

Québécitude - Photo 1
Québécitude - Photo 2

Québécitude ne raconte pas, comme on pourrait s’y attendre, les Québécois. Québécitude est ma vision de la situation actuelle de certains Québécois, les Québécois noirs.

Dans la lignée du travail réalisé pour la série B European, j’ai mêlé des éléments fictionnels à la réalité afin de composer ces visuels discursifs qui s’éloignent de la vision stéréotypée des Noirs. Ces photographies refusent aussi l’imagerie touristique de cette province du Canada. A l’inverse, ces visuels sont le résultat d’intrusions dans l’intimité des habitants (les toilettes, le jardin, etc …) et d’une revisite de lieux connus (La Montagne).

Québécitude est inévitablement un hommage à Aimé Césaire et Léopold Sédar Senghor, co-fondateurs du mouvement de la Négritude¹.

Le terme Québécitude, utilisé par les intellectuels du Québec, est une fusion des mots « Québec » et « Négritude ». Il se veut décrire la résistance linguistique, politique, intellectuelle et culturelle des Québécois enclavés dans un monde anglophone dominant.

Les Québécois ont créé le terme Québécitude en comparaison à l’acculturation des Noirs de la Diaspora résistant le monde occidental.

En réalisant Québécitude, j’ai voulu mieux comprendre le malaise culturel que vit le Québec. A travers ce personnage fictif issu de la Diaspora Noire (autoportaits), j’ai cherché à revenir à la racine du mot. Le concept de la Négritude sous-tendant le vocable Québécitude, j’ai trouvé intéressant de marquer le décalage entre la bataille de nombreux intellectuels noirs de l’époque et la situation de certains Noirs d’aujourd’hui, qui, bien que conscients de leur appartenance à la culture de la Diaspora, ne ressentent plus les mêmes priorités de la revendiquer.

Ces individus veulent maintenant explorer d’autres cultures, d’autres territoires et ne recherchent plus exclusivement le rattachement au monde noir. Répartis sur tout le globe, ils sont parfaitement intégrés à leur nation d’adoption, comme le montre Québécitude II, dans lequel, le personnage repense aux divers endroits habités, ou bien encore, la cousine imaginaire qui parle le français avec l’accent québecois (Québécitude III). Cette faculté d’adaptation, - en quelque sorte, une délivrance - leur permet d’observer à leur tour, d’autres mondes qui vivent leur propre résistance culturelle, leur propre forme de Négritude.

La première pièce de Québécitude permet de resituer certains éléments historiques. Un billet de 100 francs français, agrandi aux dimensions d’un tableau est accroché au mur d’une salle-à-manger. Est-il là en réponse au billet vert (le dollar canadien) à l’emblème provocateur (le portrait de la reine d’Angleterre) ? L’anécdote nous plonge tout droit dans la situation politique actuelle du Québec au centre de toutes les conversations.

Les références de Québécitude sont diverses. Je les dois à mon entourage d’amis et de professionnels, grâce à qui je continue de découvrir le Québec.

Je me suis inspirée entre autres, du réalisateur disparu Claude Jutra, dont j’ai découvert le travail sur place, ainsi que l’écrivain Dany Laferrière. Originaire d’Haïti, ce dernier a longtemps vécu à Montréal, et partage sa vie entre les Etats-Unis et le Québec.

Québécitude V nous invite à prendre en compte le point de vue de Laferrière², concernant l’usage du terme « Antilles ». Cette citation pourrait-elle être valable pour le terme « Québec » ? C’est une questions que je lance à tous les Québécois …

Joëlle Ferly - London, 2001

¹ Césaire préfigure le mouvement Négritude, avec son poème Nègreries, où il affirme l’utilisation du terme Nègre, jusques-là stigmatisé. Refusant ainsi d’associer les noirs à la société française, en faveur de l’émancipation. Utilisé pour la première fois en 1939 dans son poème Cahier d’un retour au pays natal Négritude renvoie à l’identité collective des noirs issus de la Diaspora Africaine, qui ont vécu une expérience de subordination historico-culturelle commune.

² Extrait de son dernier roman Je suis fatigué. Remerciements : Lanctôt Éditeur, Montréal.

Joëlle Ferly Artiste / Photographe Expositions à venir
2004
Exposition individuelle, Médiathèque de Lisieux, France
2003
Exposition collective, Cooltan Arts, Londres

European, Define me, Ferly

, exposition individuelle, The Oval House, Londres

Québécitude

,

B European

, Musée Saint John Perse, Guadeloupe

Québécitude

,

B European

, exposition internet, 198Gallery, Londres Expositions présentes et passées (sélection)
2003

Québécitude

, Château de Sacy, France

Québécitude

, Festival Vues D’Afrique, Rallye-Expos, Montréal, Canada - www.vuesdafrique.org

Québécitude

, Centre d’art et de diffusion Clark, Montréal, Canada - Patronage du ministère de la culture française. www.clarkplaza.org

A Day in the Life of Africa

, Le Meridien Hotel, Londres - Commissaire d’exposition
2002

Québécitude

,

B European

, RegArt Gallery, Lévis, Canada

A Wealth in Common

,

B European

(extraits), Bury Art Gallery and Museum, Royaume-Uni - exposition collective avec des artistes du Commonwealth.

Define me, ferly

(extracts),

B European

(extraits), London Road Gallery, Royaume-Uni - exposition collective pour célébrer la Journée Internationale des Femmes

Define me, ferly

(extraits), exposition collective, Galerie Artus, Montréal, Canada
2001
V&A Museum and Ambh, Londres - co-commissaire d’exposition de l’exposition itinérante

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Dora Experience

, Sidcup, Royaume-Uni - photographe du projet collectif multimédia